Pour assurer une gestion durable des ressources en eau souterraines, les gestionnaires doivent pouvoir disposer d'une connaissance précise des usagers (notamment agricoles) et des prélèvements qu'ils effectuent. Cette information est en effet indispensable pour concevoir, mettre en œuvre et faire respecter les règles d'allocation, quel que soit l'instrument utilisé (quotas, tarification, marchés de droits d'eau : Montginoul et al., 2016). Elle est aussi nécessaire pour assurer une gestion adaptative (réallocation) qui permette de faire face aux aléas climatiques et économiques.
Pourtant, les gestionnaires connaissent mal les quantités d'eau prélevées dans les nappes notamment par les acteurs agricoles. Les systèmes d'information qu'ils utilisent sont extrêmement frustes, peu précis et peu fiables (Sharple et al, 2020). Ils reposent souvent sur des systèmes déclaratifs, qui fournissent une information agrégée (tant spatialement que temporellement) et difficilement vérifiable. Ces lacunes sont en partie responsables des problèmes de fraude (police de l'eau : Montginoul et al, 2020), d'allocation sous-optimale et d'incapacité à faire face aux situations de crise (sécheresse).
Le développement des technologies numériques offre aujourd'hui des opportunités de modernisation de ces systèmes d'information (Singh et al, 2022; Elshall et al, 2022) qui rendraient à leur tour possible la mise en place de nouveaux modes de gouvernance de la ressource. Ainsi, l'utilisation couplée des compteurs à télérelève, de l'imagerie satellite, de l'intelligence artificielle et des outils de communication (applications smartphones) permettrait d'assurer un suivi en temps réel des prélèvements, rendant ainsi possible la mise en œuvre de nouveaux instruments économiques (tarifications complexes, mécanismes d'allocation optionnelle, marchés de volumes) et de nouvelles modalités de gestion.
Les principaux objectifs de cette thèse sont les suivants :
1 - Montrer comment l'utilisation des nouvelles technologies numériques peut permettre la mise en place de nouvelles modalités de gouvernance de l'eau souterraine, via la production et le partage d'informations en temps réel sur les usages et l'état de la ressource.
2 - Analyser la perception que les parties prenantes peuvent avoir de ces technologies et des scénarios de gouvernance associés, comprendre les causes des oppositions potentielles ainsi que les attentes qu'elles peuvent susciter.
3 - Identifier des mécanismes incitatifs et co-construire avec les parties prenantes des scénarios de mise en œuvre. En évaluer le fonctionnement dans différentes configurations, par le biais de simulations sociales (modélisation multiagents ou autre approche à développer).
Cette thèse s’inscrit dans le projet de recherche collaboratif MOSAIC-Groundwater, financé par l’Agence Nationale de la recherche (2025-2029). Il s’agit d’un projet franco-taiwanais, coordonné par Jean-Daniel Rinaudo (Brgm) et Hwa-Lung Yu (National Taiwan University, NTU).





