Sylvain Barone a soutenu son habilitation à diriger des recherches en science politique intitulée « Un verdissement conservateur. L’Etat, la gestion de l’eau et la régulation des rapports entre politiques publiques ».

Composition du jury :

M. Philippe Bezes, directeur de recherche CNRS, CEE, Sciences Po Paris

Mme Cécile Blatrix, professeure de science politique, AgroParisTech, UMR Printemps (rapportrice)

M. Olivier Borraz, directeur de recherche CNRS, CSO, Science Po Paris (garant et rapporteur)

Mme Gabrielle Bouleau, ingénieure en chef des Ponts, des Eaux et des Forêts, chercheuse HDR à l’INRAE, LISIS

Mme Anne-Cécile Douillet, professeure de science politique, Université de Lille, CERAPS (rapportrice)

M. Andy Smith, directeur de recherche FNSP, CED, Sciences Po Bordeaux 

 

Résumé :

Les politiques environnementales se sont déployées, pour l’essentiel à partir du dernier quart du XXème siècle, dans un vaste complexe d’organisations, de normes et d’interventions étatiques préexistantes au sein desquelles elles ont dû trouver leur place et qui a contribué à les structurer. Ces interventions s’étaient plutôt développées, parfois depuis plusieurs siècles, autour de la maîtrise de la nature, de la défense et de l’aménagement du territoire, du développement économique et industriel. L’atteinte d’objectifs écologiques passe aujourd’hui bien souvent par leur prise en compte par d’autres politiques publiques : agricoles, industrielles, énergétiques, judiciaires, d’aménagement du territoire, de transport, etc. Les rapports entre ces différentes interventions et l’action publique environnementale, leur articulation, leur hiérarchisation, leur ignorance mutuelle, relèvent en grande partie de l’Etat.

Il existe beaucoup de travaux sur ces interactions entre politiques et leurs effets sur le traitement des enjeux écologiques. Ceux-ci comportent toutefois souvent un biais fonctionnaliste et/ou normatif. Ils s’intéressent notamment aux obstacles existants et aux conditions favorables à l’intégration des politiques publiques au bénéfice de l’environnement, aux policy mixes permettant d’atteindre des objectifs de coordination, de cohérence et in fine de meilleurs résultats environnementaux. Nous proposons de faire un pas de côté par rapport à l’étude de ces processus intentionnels pour nous focaliser sur les ressorts et les effets, notamment institutionnels et politiques, de la régulation effective des rapports entre politiques publiques.

La démarche proposée consiste à s’extraire de l’attention portée aux seules politiques environnementales pour embrasser un spectre beaucoup plus large. Notre argument est qu’une approche attentive à la régulation des rapports entre différentes politiques publiques permet d’éclairer sous un autre jour les difficultés structurelles de l’action publique environnementale. Dans cette optique, cette dernière ne rencontre pas simplement des difficultés à trouver sa place dans un ensemble dense et en perpétuelle expansion de politiques, d’organisations, de normes. Une telle approche systémique s’intéresse également aux effets de l’accumulation et de la juxtaposition de différentes politiques publiques sur le traitement des enjeux écologiques, et à la manière dont l’Etat intervient, le cas échéant, pour gérer ces effets. Elle invite ainsi à décrypter la façon dont le traitement des questions écologiques est formaté par des institutions, des stratégies, des logiques professionnelles, etc., qui sous-tendent des politiques publiques situées en dehors du champ de l’environnement. Deux grandes questions transversales animent la réflexion : qu’est-ce que cette régulation fait à, et dit de, la structuration du pouvoir dans notre société ? Que nous apprend-t-elle sur le fonctionnement de l’Etat ?

Pour tester l’intérêt de cette approche, nous nous intéressons à un type d’enjeu écologique en particulier : la protection de la ressource en eau et des milieux aquatiques. La gestion de l’eau est modelée par des compromis avec les groupes sociaux et les acteurs sectoriels les plus directement concernés par cette gestion. Dans ce domaine, le processus d’écologisation s’est accompagné de la production et de la diffusion d’un discours sur la « gestion intégrée » (l’intégration renvoyant notamment ici aux rapports entre différentes politiques publiques), qui n’a pas été sans effets concrets. Cependant, l’écologisation ne semble possible ou tolérée que dans la mesure où ces compromis peuvent se maintenir. Ces derniers sont parfois interrogés ou mis à l’épreuve. Mais ils se trouvent en fin de compte périodiquement actualisés dans et par l’action publique. La structuration des intérêts sociaux et des rapports de pouvoir autour de ces enjeux demeure globalement stable sur la durée.

Ces caractéristiques nous renseignent sur un fonctionnement global de l’Etat, marqué par des formes de conservatisme –  dans le sens de la préservation de l’ordre social, économique et politique établi. Or, l’Etat se trouve aujourd’hui directement interpellé sur son rôle fondamental et sa capacité à protéger et adapter la société face à des enjeux écologiques et climatiques totalement inédits. Dans ces conditions, la question se pose de savoir combien de temps ces compromis et ces modes de régulation entre politiques publiques pourront se maintenir – au-delà des ajustements marginaux et du recours de plus en plus fréquent à des expédients pour gérer ces évolutions et les situations de « crise ».

Le manuscrit est organisé en quatre chapitres. Le premier chapitre présente le cadrage problématique, théorique et empirique de notre réflexion. Une revue critique de la littérature sur l’Etat, l’action publique et l’environnement est proposée afin d’argumenter sur l’originalité du questionnement. Ce chapitre précise également l’approche conceptuelle retenue (une approche institutionnelle et politique) et le matériau empirique mobilisé, constitué au fil d’une série d’enquêtes sur la gestion de l’eau. Les trois chapitres suivants présentent des résultats de recherche en proposant des pistes d’analyse à partir du cas de la gestion écologique de l’eau en France. Le deuxième chapitre est ainsi consacré à une histoire des politiques de l’eau et à la manière dont les rapports entre politiques publiques ont été normés, autour de la gestion de l’eau, par un principe d’intégration, dont l’application est caractérisée par une ambiguïté fondamentale (concilier tous les usages et protéger les milieux). Nous en analysons les usages pluriels (professionnels, territoriaux, politiques) et la propension à institutionnaliser une « écologie du compromis ». Les troisième et quatrième chapitres s’intéressent aux tensions plus ou moins vives, qui continuent évidemment d’exister en pratique, entre politiques publiques, et à leur régulation concrète.

Le chapitre 3 place ainsi la focale sur les tensions impliquant les grandes politiques d’usage de l’eau (politiques agricoles, industrielles, d’aménagement du territoire). Les travaux abordant la gestion de l’eau par le prisme des rapports entre politiques publiques restent le plus souvent cantonnés à ces domaines de proximité immédiate. Ce faisant, ils cultivent une certaine myopie à l’égard d’autres politiques, en particulier régaliennes et constitutives. La faible prise en compte de ces politiques contribue à la minimisation et à la déformation du rôle de l’Etat. Il est pourtant évident que les choix en matière de budget, d’organisation administrative, de décentralisation, de contrôle des comportements, de sanction pénale, ne peuvent rester sans effet sur le traitement des enjeux liés à l’eau, ce que montre le chapitre 4. A l’issue de ces deux chapitres, plusieurs modes de régulation des rapports entre politiques sont mis en évidence : intégration soft, face-à-face conflictuel, intégration inversée (au détriment des écosystèmes), contournement discret et verdissement conservateur, qui confère un surcroît de légitimité à certaines postures, orientations ou mesure, sans avoir à modifier les arrangements déjà en place, ni à payer le prix politique d’une véritable écologisation.

La conclusion revient sur les principaux enseignements empiriques et théoriques de ces développements concernant d’une part la gestion de l’eau, prise dans la « colle » des compromis multi-sectoriels, et d’autre part la sociologie de l’Etat face aux bouleversements écologiques et climatiques.

Deux vidéos sur l'accompagnement de la gouvernance concertée des eaux souterraines sur 2 terrains d'étude :

 

1 - Accompagner la gouvernance concertée des eaux souterraines – Conception de politiques à Limaoua, Tunisie

Cette vidéo illustre comment initier une démarche participative locale sur les eaux souterraines. A Limaoua, dans le gouvernorat de Gabès en Tunisie, la démarche participative était basée sur une théorie de conception appelée la théorie C-K (concept/connaissance). Cette théorie permet d’identifier des solutions innovantes au problème de dégradation et de surexploitation des eaux souterraines. Des entretiens et plusieurs ateliers ont été mis en œuvre avec une trentaine d’acteurs de la zone (agriculteurs, administration, associations d’usagers, chercheurs, etc.). Ils ont permis d’initier le dialogue entre les usagers et avec l’administration, de se mettre d’accord sur une préoccupation commune, d’identifier des principes de gouvernance des eaux souterraines, d’identifier des solutions à mettre en œuvre et de construire du capital social entre les participants.

Pour voir la vidéo, cliquez ici

 

2 - Accompagner la gouvernance concertée des eaux souterraines – Rétro-prospective de gouvernance à Aousja, Tunisie

Cette vidéo illustre comment initier une démarche participative locale sur les eaux souterraines. A Aousja, dans le gouvernorat de Bizerte en Tunisie, la démarche participative était basée sur la modélisation, avec les acteurs de la zone, de la gouvernance passée actuelle et future des eaux souterraines. Suite à la construction de modèles individuels via des entretiens, deux ateliers ont permis de mettre en discussion les résultats, en utilisant la méthodologie du visioning et du triangle du futur. Une quarantaine de participants ont ainsi pu identifier les leviers d’action pour aller vers une gestion plus durable et équitable des eaux souterraines dans la zone.

 

Pour voir la vidéo, cliquez ici

 

 2023
13/06

Participation, sur invitation, au séminaire réalisé au BC3 Bilbao - D. Dubois, M. Brugnach et S. Farolfi

Pour en savoir plus : https://twitter.com/BC3Research/status/1668591085604466688

 

 

 

 

 

 

 

 

25-26/05

PRECOS a participé en masse à la conférence annuelle de l’ASFEE (Association Française d’Economie Expérimentale) à Montpellier : https://asfee2023.sciencesconf.org/

 

Les quatre présentations de l’équipe :

The approval mechanism with delegation: An experiment on CPR - Gabriel Bayle, Stefano Farolfi, Emmanuelle Lavaine, and Marc Willinger

Résumé - Présentation

 

Social capital and targeted beneficiaries of a development project: A lab in the field experiment in rural Zimbabwe - Amandine Belard, Stefano Farolfi , Damien Jourdain , Marc Willinger, Mark Manyanga and Tarisai Pedzisa 

Résumé - Présentation

 

Does relational quality in a group affect CPR management? - Marcela Brugnach, Dimitri Dubois, and Stefano Farolfi

Résumé - Présentation

 

Preventing over-exploitation in a dynamic CPR game with heterogeneous players: A comparison of awareness, communication and advice in the lab - Dimitri Dubois, Katrin Erdlenbruch, Stefano Farolfi, Wafa Koussani, Emmanuelle Lavaine, Oussama Rhouma, and Marc Willinger

Résumé - Présentation

 

 

Alors que l’eau se raréfie, la désalinisation et la réutilisation des eaux usées traitées sont présentées comme des solutions techniques évidentes, conciliant le maintien d’un modèle productiviste et l’accès de tous à une ressource de qualité. Dans un numéro spécial de la revue Water Alternatives, plusieurs scientifiques, dont le chercheur en sciences politiques au Cirad Pierre-Louis Mayaux, prennent le contrepied de cette vision techniciste. A grand renfort d’études de cas, ils soulignent la nécessité de débattre collectivement de ces solutions et de leurs alternatives.

Pour en savoir plus, cliquez ici

Vendredi 07 juillet 2023, Ons KAMMARTI, doctorante à L’Institut National Agronomique de Tunisie (INAT) – Université de Carthage, actuellement en accueil à G-Eau jusqu'à fin août 2023, nous a présenté ses travaux intiulés : Comment mesurer l’insécurité à l’eau des ménages raccordés à un branchement individuel ? Développement d’un instrument de mesure et application en milieu rural en Tunisie

 

Résumé :

Pour répondre à cette question, il est au préalable nécessaire d’en définir les contours. Nous adopterons la définition suivante : est en état d’insécurité à l’eau tout ménage soumis à des interruptions d'une durée supérieure à 24 heures par semaine au cours d'un mois typique, que ces interruptions aient été continues ou fragmentées et qu'elles aient été associées ou non à une mauvaise qualité de l'eau. À partir de cette définition, l’objectif de la recherche est de développer un instrument de mesure de cet état d'insécurité pour les ménages raccordés individuellement à un réseau hydraulique en milieu rural tunisien, de plus en plus fragilisés par des coupures fréquentes et prolongées ainsi qu'une qualité d'eau jugée médiocre. Nous nous appuyons pour cela sur des travaux antérieurs et procédons en conduisant des analyses qualitatives et quantitatives réalisées à partir de deux enquêtes successives auprès de ménages. Le résultat final prend la forme d'une échelle composée de 5 éléments.

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