Résumé :

Les zones humides temporaires sont des espaces de transition entre milieux aquatique et terrestre, souvent difficiles à appréhender. Historiquement, elles étaient perçues comme sous-valorisées, nécessitant un assainissement pour soustraire la terre à l’eau afin de rendre possible une mise en valeur agricole intensive. Ces zones sont également de plus en plus reconnues comme des espaces de l’eau importants pour le soutien de la biodiversité, la séquestration du carbone et la régulation des crues. Cependant, ces visions contrastées de milieu terrestre (à condition d’être assaini) ou de milieu aquatique (à condition d’être protégé et restauré) font abstraction du fait que des communautés locales vivent et exploitent ces milieux en transition. Ces usages, adaptés à ces milieux, sont souvent invisibles pour les acteurs institutionnels créant des conflits sur leur légitimité. Cette thèse analyse la pluralité des rôles des zones humides temporaires et vise à comprendre comment les visions des acteurs façonnent ces zones. La thèse se déroule dans les merjas de la zone centrale de la plaine du Gharb (Sidi Ameur, Bokka, Kebira, Jouad-Tidjina), qui 100 ans après le début de l’aménagement hydro-agricole de la plaine, sont toujours dans une situation conflictuelle sur les usages actuels et leur devenir. La thèse a abouti à trois résultats principaux. Tout d’abord, l’approche par les services écosystémiques dévoile les antagonismes entre acteurs sur les rôles des merjas. Pour les acteurs institutionnels, les merjas ont un destin régional voire national, comme futurs périmètres irrigués, ou alors comme zones tampons pour réguler les crues. Les communautés locales éprouvent un sentiment d’attachement à la terre et valorisent la production agricole des merjas. Cependant, ces usages restent invisibles pour les acteurs institutionnels. Malgré le débat international sur l’importance des zones humides temporaires pour la biodiversité et le stockage de carbone, ces dimensions restent cantonnées à des merjas permanentes, en dehors de la zone centrale. L’approche sociohydrologique montre que les ontologies binaires considérant les merjas soit comme des terres assainies ou des zones tampon pour réguler les crues ne concordent pas avec leur fonctionnement dynamique. Les résultats de la télédétection ont révélé que la submersion des merjas dépend surtout des conditions locales (topographie, pluie locale, proximité de point de débordement, degré d’hydromorphie du sol, configuration géomorphologique), expliquant l’adaptation des communautés locales à la présence de l’eau tout en revendiquant l’accès à la terre. Enfin, l’approche d’ingénierie de la concertation a rendu visible la vision des communautés locales sur les usages actuels en les engageant, au même plan que les acteurs institutionnels, dans un processus de réflexion et de négociation sur les scénarios d'aménagement. Les résultats de l’approche montrent que l’aménagement hydro-agricole des merjas doit se faire en concomitance avec l’assainissement de l’assise foncière. La démarche méthodologique de la thèse, conçue pour ce milieu complexe de transition, pourra être mobilisée dans des territoires fluides et marqués par des relations conflictuelles entre des acteurs convoitant ses ressources.

 

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Merja Ras Daoura (merja côtière) - (© Choukrani, 2018)
Merja Sidi Mohammed Benmansour (merja côtière) - (© Choukrani, 2018)

 

Mots-clés : services écosystémiques, sociohydrologie, ingénierie de la concertation, zones humides temporaires, milieux en transition, merjas, plaine du Gharb, Maroc

Le séminaire ICIREWARD Unesco-SHS du mercredi 13 décembre  sur le thème : "Pollutions agricoles des eaux littorales : les savoirs en action" a permis d’écouter les travaux de Alix Levain et Magalie Bourblanc, discutés par Christelle Gramaglia (sociologue à l’UMR GEAU).

 

  • Alix Levain est anthropologue (CNRS, UMR 6308 AMURE).

Elle présentera « Au-delà du déni : les agriculteurs bretons et l’imputation des causes des marées vertes en Bretagne »

Bien peu de territoires échappent aujourd’hui en Europe aux pollutions agricoles diffuses, et à la polarisation très forte du débat public entre des positions critiques des systèmes de production qui les génèrent d’une part, et ce qui est souvent qualifié de « déni » des agriculteurs d’autre part. Comment aller plus loin dans la compréhension de ce qui se joue autour de ces pollutions pour les agricultrices et agriculteurs ? Comment comprendre la façon dont s’articulent leur expérience quotidienne des effets de ces pollutions et le sens qu’elles et ils leur donnent ? A partir d’une enquête au long cours dans trois territoires ruraux et littoraux touchés par les marées vertes en Bretagne, Alix Levain proposera d’historiciser cette expérience et de relire le « déni » des agriculteurs à l’aune de la théorie de la dissonance cognitive : les processus de réduction de la dissonance cognitive qui sous-tendent le rejet du lien entre pratiques agricoles et pollutions aquatiques constituent en effet un outil puissant de repérage et de description des tensions cognitives au sein des sociétés post-rurales. En ce sens, ils rendent possible une forme alternative d’appréhension des situations de controverse environnementale prenant en compte la complexité de l’expérience de l’écologisation.

 

  • Magalie Bourblanc est politiste (CIRAD, UMR G-EAU).

Elle présentera : « Mise en problème et mise en cause : Le rôle de l'expertise scientifique dans la mise à l'agenda politique des pollutions agricoles sur une lagune du littoral méditerranéen »

L’état écologique de l’étang de l’Or (Occitanie) est réputé être particulièrement dégradé depuis les années 1990. En dépit de l’existence de programmes d’action réglementaires ou volontaires depuis les années 2000, la reconquête de la qualité des eaux n’a pas permis d’obtenir, jusqu’à présent, de résultats probants, ce qui contraste assez fortement avec la success story de la lagune voisine de l’étang de Thau. Dans ce contexte, Magalie Bourblanc évoquera la manière dont le déploiement de savoirs experts contribue à la fois à la mise à l’agenda des pollutions agricoles et au traitement renouvelé de ces questions, notamment en permettant de dépasser, en partie, leur caractère diffus.

La thèse s’inscrit dans cette prise de conscience globale de la valeur de l’eau, l’or bleu, écho des Objectifs de Développement Durable (ODD) de l’ONU pour un avenir meilleur et plus durable pour tous. L’agriculture en Europe et dans le monde est le poste le plus consommateur d’eau. L’utilisation d’eaux usées traitées (‘reuse’) s’avère une solution possible.

Vendredi 08 décembre 2023 à 11h00, Claire Micklethwaite nous a présenté ses travaux intitulés "Qualité et gestion des données : mise en place d’un plan de gestion de données pour la plateforme PRESTI : comment avons-nous réussi à mettre en place des bonnes pratiques concernant la production de données et archiver celles produites précédemment"

 

schema Résumé : La plateforme de PRESTI a récemment été reconnue en tant qu’infrastructure expérimentale et dans ce cadre-là, elle doit commencer à se conformer aux exigences INRAE concernant la sauvegarde des données : que ce soit dans l’archivage mais surtout dans l’enregistrement des données produites récemment. L’objectif, bien qu’il s’agit de valider le statut de IE pour PRESTI, est d’également limiter la perte de données (suite au départ de stagiaires ou de CDD par exemple) et de faciliter la réutilisation de ces dernières.

Mon travail a consisté à faire un inventaire des données existantes, d’amorcer un travail d’archivage et de mettre en place des normes de production et d’enregistrement des données. Toutes ces actions ont été rendues complexes par la grande hétérogénéité des données et le fait que je n’avais pas manipulé une grande partie des données produites (notamment celles des thèses).

En commençant par faire un point sur les exigences d’INRAE par rapport aux objectifs nationaux de science ouverte je parlerai ensuite de ce que j’ai mis en place pour PRESTI :  de la normalisation de la nomenclature, à la création de fichier type and passant par la rédaction des métadonnées, rédaction du plan de gestion de données (PGD)…

La gestion qualitative des données va au-delà des principes de la science ouverte et devient un gage de qualité pour toute plateforme de recherche. J’espère que mon travail pourra aider d’autres plateformes à mettre en place des bonnes pratiques concernant la production des données de recherche… 

Vendredi 1er décembre 2023 à 11h00, Mahmoud MAAMR, doctorant en sociologie à l’université Moulay Ismaïl de Meknès (Maroc) a présenté ses travaux de thèse intitulés "Rapports de générations à la lumière des dynamiques agricoles et sociales dans les extensions agricoles des oasis ; Cas de l’oasis de Ferkla (Maroc)"

La thèse est effectuée sous la Direction de Zhour Bouzidi (UMI), Marcel Kuper (Cirad) et Pierre-Louis Mayaux (Cirad).

maamr © Photo : Mahmoud MAAMR 

Résumé :

Dès le début des années 1970, de nouvelles extensions agricoles commencent à émerger en lisère des anciens périmètres oasiens de Ferkla. De nombreux profils d’agriculteurs se sont venus s’installer en capitalisant sur un accès déverrouillé à l’eau souterraine, l’argent issu de la migration internationale favorisée durant les années 1960-70, ainsi que l’accès aux terres collectives partagées. Au cours des années, les conditions d’accès à l’installation dans ces extensions changent significativement. Les politiques migratoires sont devenues restrictives dès la fin des années 1990, l’eau souterraine s’est avérée de plus en plus rare, ainsi que l’accès à la terre n’est plus facilement ouvert en raison des prix et des restructurations de marché foncier. Paradoxalement, certaines opportunités sont offertes, particulièrement les généreuses subventions de l’Etat, l’encouragement des jeunes à s’organiser dans les coopératives de prestations de services agricoles ainsi que d’autres opportunités liées à l’évolution des nouvelles technologies de mobiliser les ressources et de commercialisation. 

Face à ce contexte paradoxal, les jeunes cherchent à contourner les contraintes pour saisir des opportunités. De ce fait, ils tendent plutôt à s’installer sur les exploitations déjà établies comme un fondement et chercher leur part des opportunités. Cela les amène à se cohabiter avec leurs aînés qui sont déjà installés dans les extensions. Au cours de cette installation conjointe, un processus de négociation des rapports entre les deux générations, jeunes et vielle, se met en place. En effet, mon projet de thèse s’intéresse à élucider le fonctionnement de ce processus ; les acteurs directs et indirects qui y sont impliqués, les moyens mobilisés pour la négociation ainsi que ses débouchés sur ces rapports eux-mêmes et sur l’agriculture oasienne. 

Ce vendredi 17 novembre à 11h, Leo Bire nous a présenté son projet de thèse intitulé « Participation, Simulation, Pouvoir. Comprendre les modalités de circulation du pouvoir à l'oeuvre dans les systèmes d'irrigation au Vietnam ».

Leo débutera sa thèse en sciences sociales/géographie sociale (avec des méthodes interdisciplinaires géographie, anthropologie du développement, sciences de l’informatique) le 1er décembre 2023, sous la direction de Jean-Philippe Venot. Il sera principalement basé au Vietnam à l'université de l'irrigation dans le LMI ACROSS (Advanced Comptuational Research On Sustainability Sciences).

 

bire vietnam web © Photo : Léo Biré

 

 

Résumé : Ce projet de recherche s’intéresse aux systèmes d'irrigation vietnamiens au prisme du « cycle hydro-social » (Budds et al., 2014), c’est-à-dire à travers la manière dont les relations de pouvoir guident les modalités de gouvernance de ces systèmes et la façon dont le pouvoir émerge et circule au sein des catégories d’acteurs qui les composent. Il aborde le thème du pouvoir à travers la gestion participative de la ressource en eau, obligatoire au Vietnam depuis 2004, qui connaît des applications contrastées dans le pays. Ce projet de recherche postule que l’utilisation de jeux sérieux informatisés auprès des acteurs de cette gestion (gestionnaires et irrigants) aiderait à engager le dialogue sur la gestion participative de l’eau, et permettrait la création d'événements propices à l’expression de processus de négociation, autrement difficilement accessibles. La thèse explore donc l’usage des simulations participatives en se situant à l’interface de plusieurs champs de la géographie environnementale, notamment la political ecology, les Socio-Technical System Theories, et certaines logiques propres à l’approche critique de la modélisation d’accompagnement.

 

image2© Photo : I. A. Ramos-Fuentes (Sun’Agri 3 – 2021)

 

 

L’accès à l’eau potable diminue dans la plupart des pays (Burek et al., 2016), en raison de plusieurs facteurs démographiques et climatiques, ainsi que d’une gestion inefficiente des ressources en eau, notamment dans le domaine agricole. En France, l’agriculture irriguée est une activité importante, principalement concernant les grandes cultures (maïs et autres céréales), dans un contexte où les restrictions d’usages de l’eau s’avèrent de plus en plus fréquentes, surtout dans les régions méditerranéennes. Il a été démontré qu’une conduite "bien pensée" de la culture sous les systèmes agrivoltaïques permet de diminuer les besoins en eau et de maintenir un niveau de production comparable à celui d’une culture à ciel ouvert.

 

image1© I. A. Ramos-Fuentes (Sun’Agri 3 – 2021)

 

 

Les dispositifs agrivoltaïques dynamiques (AVD) permettraient un contrôle supplémentaire sur le système via le contrôle de la rotation des panneaux, notamment pour diminuer l’hétérogénéité de la distribution des pluies résultant de leur présence. Cette configuration pose aussi des questions d'optimisation plus complexes, en particulier parce que le mouvement des panneaux modifie les motifs spatiaux et temporels de l’ombre portée et donc la réponse de la plante à ces hétérogénéités. Par conséquent, le bilan hydrique du sol, les besoins en eau de la culture, sa croissance et sa production de biomasse doivent être décrits par des processus spécifiques au contexte agrivoltaïque dynamique. C’est particulièrement le cas pour les grandes cultures, car ce sont des cultures avec des cycles longs, présentant une physiologie plus complexe et des réponses au rayonnement diverses (métabolismes de type C3 ou C4 ; Campillo et al., 2012). Ce sont aussi des cultures pour lesquelles des contraintes sur l’irrigation vont certainement exister et devront être simulées (adaptation des techniques d’irrigation, disponibilité de la ressource) afin d’optimiser l’usage de l’eau.

 

Mots clés : Agrivoltaïsme dynamique ; Irrigation ; Modélisation agronomique ; Optimisation ; Grandes cultures

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